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Chopin : Valses – Tristan Pfaff

Tristan Pfaff ne fait pas semblant, c’est puissant, fougueux, rapide, explosif !

Les quatre Grandes Valses Brillantes vous font chavirer et vous enivrent du début à la fin.

La prise de son très directe, sans effet de réverbération, mais légèrement décalée sur la gauche doit sans doute contribuer aussi à cette impression de dynamique phénoménale.

L’instrument ? Il est également particulièrement puissant ce Steinway D Hambourg de 1978.

Ce disque débute par la série des Grande Valses Brillantes, ces valses qui n’étaient pas destinées à être dansées mais à « toucher les cœurs et faire voyager les esprits ».

Ce qui caractérise le jeu du français est sans aucun doute l’entrain et le volontarisme. Tristan Pfaff ne s’y jette pas à moitié, il s’y jette bel et bien à corps perdu.

Il n’y a peut-être pas cette élégance caractéristique et ce côté sautillant qu’on retrouve chez Louis Lortie pour faire référence à une production récente. Il y a une dimension plus mécanique, pour autant plus engagée, mais moins chantante chez Tristan Pfaff. Le final de la valse opus 18 est d’ailleurs un véritable feu d’artifice.

Les trois valses opus 34 sont jouées dans la même veine, avec un tempo assez rapide.

Il n’y a pas énormément d’épanchement chez Pfaff dans la valse numéro 2 en la mineur opus 34, ni aucune forme de maniérisme. Et pourtant, ou peut-être parce que, il y a une forme de chant naturel qui émane du jeu du pianiste, une forme d’évidence retrouvée. J’ai presque ressenti cette pulsation qu’on peut apprécier dans cette valse jouée par Arthur Rubinstein, et bien que le tempo soit vraiment plus lent.

La Valse n°3 en fa majeur paraît selon moi un peu trop mécanique, comparée à la version d’un Louis Lortie qui joue davantage avec le tempo qu’il étire ou compresse de façon subtile, une meilleure utilisation du rubato, sans doute le fruit de l’expérience…

L’interprétation de Tristan Pfaff comporte néanmoins beaucoup de relief, et est jouée de façon plus verticale, choix esthétique auquel on sera plus ou moins sensible, question de goût. Le pianiste fait d’ailleurs un usage modéré de la pédale, ce qui permet sans doute d’exprimer tout le potentiel de virtuosité de son jeu excessivement rapide et puissant.

Cela se vérifie avec la Grande valse opus 42, qui offre un joli contraste dynamique.

La série des trois opus 64 met en exergue la grande virtuosité de Tristan Pfaff, sans pour autant que la « Valse Minute » rompe totalement avec cette linéarité qu’offrent beaucoup trop de versions. L’interprète insère néanmoins un relief certain, alors qu’il est particulièrement rapide dans son exécution. L’interprétation explosive de Samson François reste néanmoins pour moi intouchable, indétrônable pour ces trois valses opus 64. Et j’aurais aimé entendre ici davantage d’audace chez ce jeune pianiste.

Dans la première des valses posthumes opus 69, Tristan Pfaff prend son temps, calme le jeu, mais sans trouver la magie que restitue un Claudio Arrau (enregistrement Philips). Pas facile de trouver le juste dosage de la main gauche dans cette valse. J’ai trouvé personnellement celle de Tristan Pfaff un peu timide.

La seconde reprend un tempo plus rapide, plus en phase avec le tempérament fougueux de Pfaff. On ressent davantage les accentuations, la ponctuation rythmique que le pianiste imprime de façon globale à cette intégrale des valses de Chopin.

J’aime beaucoup cette prise de son naturelle, sans artifice, finalement très directe.

Les opus 70, et dernières des 17 valses enregistrées par le label Ad Vitam Records s’insèrent dans la continuité.

Un album très droit, virtuose, historiquement informé, et ne cédant pas aux sirènes d’un rubato par trop consensuel. C’est peut-être la meilleure façon de rendre hommage à la personnalité complexe de Frédéric Chopin.

Un très bon disque dans son ensemble, et une intégrale qui mérite de prendre place au côté des versions de référence pour sa fraîcheur communicative !

  • Titre: Chopin : Valses.
  • Artiste : Tristan Pfaff (piano).
  • Format: PCM 16 bit 44,1 kHz.
  • Ingénieur du son: Jean-Yves Labat de Rossi.
  • Editeur/Label: Ad Vitam Records.
  • Année: 2023
  • Genre: Classique.
  • Intérêt du format HD (Exceptionnel, Réel, Discutable): Format CD uniquement.