La nouvelle Athènes, c’est un quartier parisien où régna au XIXème siècle une grande effervescence artistique.
Ce quartier du 9ème arrondissement abrite aujourd’hui le Casino de Paris, mais était à cette époque le temple de l’intelligentsia artistique où les salons parisiens hébergeaient des hôtes aussi prestigieux que Franz Liszt, Frédéric Chopin, ou bien encore les facteurs de piano Erard et Pleyel. C’était un peu les « jam sessions » avant l’heure, car on y organisait des joutes musicales et des séances d’improvisation. C’était à l’époque un mouvement très avant-gardiste. Voilà pour les éléments de contexte !
C’est ce que ce disque, enregistré en live au Petit Palais dans le cadre de l’exposition »Paris romantique », début 2019, essaie d’illustrer avec des œuvres assez peu connues comme celles du grand pédagogue Karl Czerny ou bien encore celles du disciple de Boieldieu, Adolphe Adam. Mais on y retrouve aussi un répertoire plus familier et notamment Carl Maria Weber, Franz Liszt, lui-même élève de Czerny, et bien sûr Frédéric Chopin.
Et pour que l’évocation soit plus saisissante, ces pièces ont été jouées sur instrument d’époque, un piano Erard de 1838.
Le Nocturne sentimental de Karl Czerny interprété par Laura Granero ouvre immédiatement des horizons, ceux qu’emprunteront par la suite Liszt ou Chopin. Le jeu est d’une exquise sensibilité et on apprécie très vite les timbres vintage légèrement acides du Erard en forme de clavecin.
L’Andante consolante de la 4ème Sonate op.70 de Weber, jouée par le maestro Torbianelli est tout autant dans la retenue, puis s’envole passionnément. Le jeu des duels et des défis est donc apparemment entamé.
Olga Paschenko fait donc logiquement son entrée dans l’arène avec une transcription d’un lied de Schubert par Liszt, « Auf dem Wasser zu singen », où toute la puissance dramatique et lyrique du compositeur hongrois nous apparaît avec un naturel confondant.
Mais on s’aperçoit très vite que le côté lyrique est ici omniprésent. Cette époque était de toute évidence marquée par l’opéra. Edoardo Torbianelli nous livre alors une version très habitée du thème favori de « la Norma » transcrite au piano par Frédéric Kalkbrenner.
Le chant du piano ne restera seul que le temps de cette Norma. Suivent l’Air d’Annette de Weber et Le retour à la montagne d’Adolphe Adam qui témoignent au travers de la soprane Jeanne Mendoche de l’engouement de l’époque pour les airs d’opéra et l’opérette.
Et puis il y a Chopin, sans doute l’invité de marque de ces soirées, s’il fallait en retenir un seul.
Ses deux valses op. 69, et son prélude op. 28 nous emmènent au firmament du rubato. Un exercice sans doute pas si facile à réaliser sur un tel instrument…
La Fantaisie – impromptu op. 66 servi par un Torbianelli en grande forme en est par ailleurs une vraie démonstration.
J’allais presque oublier Liszt, et ses Harmonies poétiques et religieuses. C’est à Olga Pashchenko que revient l’honneur de s’engager à repousser les limites du piano Erard, finissant de nous bouleverser par une interprétation intense, dramatique et romantique à la fois. J’avoue m’être laissé prendre par la sonorité envoûtante de l’instrument et avoir monté le son pour me laisser totalement submerger.
Un disque aux jolies saveurs surannées qui remplit son objectif premier : celui de recréer le temps d’un enregistrement, et d’un concert, l’atmosphère des salons de la Nouvelle Athènes.
- Titre: Dans un salon de la Nouvelle Athènes.
- Artiste: Edoardo Torbianelli, Olga Pashchenko, Laura Granero (piano), Ensemble Lélio, Benjamin D’Anfray (piano).
- Format: PCM 16 bit, 44,1 kHz
- Ingénieur du son : Aude Besnard.
- Editeur/Label: Sonanero.
- Année: 2019
- Genre: Classique
- Intérêt du format HD (Exceptionnel, Réel, Discutable): Format CD uniquement.