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Les fleurs du paradis / Matthieu Stefanelli

Le pianiste et compositeur niçois Matthieu Stefanelli nous livre un deuxième album consacré aux différentes formes du sacré.

C’est une musique particulièrement variée, et sophistiquée que nous propose le Stefanelli.

La genèse de ce projet artistique résiderait dans l’incendie de la cathédrale de Notre Dame à Paris, qui au delà du simple drame, est aussi aux yeux du compositeur un message d’espoir, celui de la résilience, et peut-être tout simplement de l’éternité, à la vue des rosaces demeurées intactes.

C’est ainsi qu’est né ce deuxième quintette pour piano et quatuor à cordes, intitulé « Fleurs du Paradis ». C’est en quelque sorte un hommage à l’histoire musicale de Notre Dame, de Pérotin au XIIème siècle aux grandes œuvres pour orgue du XIXème.

C’est aussi une fresque sonore relatant l’histoire de cet incendie, avec la fameuse chute de la flèche de la cathédrale, si bien mise en scène dans le cinquième mouvement, ou bien encore le départ de feu du quatrième mouvement.

Mais l’album ne se limite pas à la seule évocation de Notre Dame, mais aborde une dimension plus spirituelle, l’évocation d’un sacré multiculturel.

La messe « In tempus sacri » rappelle ainsi les chants grégoriens de tradition mozarabe, où se mêlent Islam et Christianisme.

C’est une œuvre assez troublante de par cette dualité et cette liberté évidente prise avec les codes de la messe romaine, pour en faire une sorte de louange hybride, aux diverses facettes d’une piété quasi angoissante, comme l’évoque de façon si manifeste le long Credo de cette messe.

« Praeludium et organum », pour violoncelle seul, est un hommage à la musique ancienne sacrée du XVIème siècle, sans doute la composition la plus apaisante de ce disque, nous invitant au recueillement. On notera quelques influences orientales venant ponctuer cet organum et ce duplum.

Les « Incantations pour violoncelle » constituent presque une continuité de ceux-ci en insérant des airs aux consonances celtiques, mais toujours à la frontière de plusieurs univers musicaux.

La sonate « Aevum » s’inspire d’un texte de Saint Thomas d’Aquin : l’Aevum serait d’après Stefanelli un temps avec un début mais sans fin, le temps des anges et des saints. Peut-être aussi une façon de saluer son épouse violoniste en l’accompagnant dans cette sonate pour violon et piano…

Il y a cette évidente complicité à jouer une œuvre très contemporaine, et plutôt tourmentée. Le dernier mouvement « Réminiscences d’un rêve » est en effet particulièrement agité…

La toccata qui suit, intitulée « Lux », referme cet album par un hommage à la musique de Bach, mais en la projetant dans une forme de modernité où différentes influences se font ressentir, du minimalisme à Ravel, en passant par certaines sonorités jazz…

C’est donc un album empruntant beaucoup de directions, trop peut-être pour pouvoir coller une étiquette ou un style sur la veste de Matthieu Stefanelli. Il n’empêche que ce disque regorge d’idées intéressantes, d’évocations toutes différentes de la spiritualité et du sacré. Un joli moment d’émerveillement et de méditation.

  • Titre: Les fleurs du Paradis – Matthieu Stefanelli.
  • Artistes : Quatuor Girard, Sebastian Ené (piano), Laetitia Corcelle (chant), Anne Bertin-Hugault (chant), Ensemble La Sportelle, Pierre-Raphaël Halter (contrebasse), Lisa Strauss (violoncelle), Fanny Stefanelli-Gallois (volon), Matthieu Stefanelli (piano).
  • Format: 24 bit / 48 kHz.
  • Ingénieur du son: Aurélien Bourgois.
  • Editeur/Label: Editions Hortus.
  • Année: 2022
  • Genre: Contemporain.
  • Intérêt du format HD (Exceptionnel, Réel, Discutable): Discutable.