C’est un jeu à la fois puissant et subtil. Alexander Paley nous livre ici un Rachmaninov tragique, profond, sans rubato, sans artifice… Le pianiste Moldave opte pour une interprétation peut-être moins consensuelle, mais aussi plus juste, ou mieux historiquement informée…
En effet, et contrairement à l’idée d’un lyrisme débridé trop souvent ancrée dans l’opinion populaire, Rachmaninov dans son œuvre pour piano était d’une incroyable rigueur, bien peu enclin à abuser du rubato ni à faire preuve d’une sentimentalité excessive en sombrant dans une mimique chopinienne, et bien que ces œuvres y fassent écho.
Dans les Préludes, les arpèges sont saillants, les accords puissants. On est assez loin de la rondeur et du légato romantique du jeu de Nikolaï Lugansky pour faire référence à son enregistrement, d’ailleurs pas si récent, pour Erato.
Alexander Paley y délivre des sonorités franches et larges, dans un tempo très personnel qui tient en haleine l’auditeur, comme suspendu à chaque note.
Les Études-Tableaux sont également joués avec conviction et sobriété. La partition suffit d’ailleurs à elle-même pour laisser passer toute la poésie et l’émotion voulue par Rachmaninov. C’est une forme de parti pris. On pourra préférer la beauté plastique d’un spécialiste du répertoire comme Vladimir Ashkenazy.
La prise de son très rapprochée renforce d’ailleurs ce sentiment de droiture.
Mais j’avoue que plus les années passent et moins j’apprécie la virtuosité démonstrative, les tempi trop rapides, et l’abus de rubato. Aussi, cette interprétation profondément honnête et touchante d’un artiste qui vous prend par la main, pour vous permettre d’apprécier sans fard la beauté de ces pages écrites après une difficile traversée du désert, m’a procuré un ineffable bonheur.
- Titre: Rachmaninov Préludes Op.23 – Etudes – Tableaux Op.33.
- Artistes : Alexander Paley.
- Format: PCM 24 bit, 96 kHz
- Ingénieur du son : Cyprien Matheux.
- Editeur/Label: La Musica.
- Année: 2020
- Genre: Classique.
- Intérêt du format HD : Réel.
