La mezzo-soprano Sonja Leutwyler nous offre un second opus dédié aux trios voix, violon et piano.
Comme dans le précédent album «Hymne à la beauté », sa sœur violoniste l’accompagne ainsi que le pianiste Benjamin Engeli.
La thématique de deuxième album est double : les mystères de la nuit et de la nature, mais aussi les compositrices du début du vingtième siècle.
S’il semble assez stérile de développer ces thématiques, il m’a semblé en revanche important de saluer cette voix puissante et ensorcelante, celle de Sonja Leutwyler, ainsi qu’un jeu au piano et au violon qui rivalise de prestance avec la chanteuse (il n’y a pour s’en convaincre qu’à écouter le superbe « Nocturne » de Lili Boulanger), pour former un vrai trio qui fonctionne à merveille.
Ajoutez à cela une belle prise de son, avec le juste niveau de réverbération, une excellente balance, et vous obtiendrez un candidat potentiel au Grand frisson.
L’essai est transformé par une sélection d’extraits musicaux originale, particulièrement expressive, et parfaitement interprétée.
Le compositeur Carl Reinecke est à l’honneur avec ses lieders opus 26 et ses liebeslieders opus 195. C’est un répertoire de toute évidence intime et maîtrisé par les interprètes. On ressent l’engagement des musiciens sans que cela devienne une guerre d’égo ni une mise en avant d’une cantatrice superstar. Les interprètes partagent de toute évidence la même passion pour ces œuvres, et la complicité est bien présente.
J’ai apprécié cette profusion d’expressivité et d’entrain dans le répertoire français de Cheminade et Saint-Saëns. La langue est également maitrisée et on passe de l’allemand au français sans que cela représente une rupture trop brutale.
Le choix des pièces courtes du Suisse Othmar Schoeck est également une jolie surprise.
On se plaît à (re)découvrir les travaux du hongrois Erwin Schulhoff, et plus particulièrement ici « Drei Stimmungsbilder, Opus 12 », avec un très bel équilibre instrumental et rythmique, ainsi qu’une tension supérieure à l’enregistrement de Magdalena Kožená chez DG (sans doute trop réverbéré).
Que dire de la poésie d’Amy Beach, si bien restituée ici, avec un lyrisme si confondant. « A mirage » et « Stella viatoris » en sont deux magnifiques illustrations.
Enfin, si cet album regorge de pépites, le joyau de cet album est sans doute tiré du répertoire du compositeur contemporain germano-iranien Arash Safaian.
Les deux poèmes « Styx » et « Zur Nacht » sont tellement envoûtants que je les ai écoutés en boucle tout un après-midi.
Quelle voix, et quelle sens de l’éloquence !
C’est finalement un album assez indéfinissable, à l’instar de ces nuits secrètes qui doivent par définition garder leur part de mystère…
Et sans surprise, et sans grand mystère, cet album se voit récompensé de notre Grand frisson 2023. Un très beau disque !
- Titre: Secret Nights.
- Artistes : Sonja Leutwyler (chant), Astrid Leutwyler (violon), Benjamin Engeli (piano).
- Format: PCM 16 bit 44,1 kHz.
- Ingénieur du son: Andreas Werner.
- Editeur/Label: Solo Musica.
- Année: 2023
- Genre: Classique.
- Intérêt du format HD (Exceptionnel, Réel, Discutable): Format CD uniquement.
