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Éditorial juillet 2023 

Pensées munichoises

Après trois années d’absence, revenir fréquenter le plus grand salon mondial de l’audio haut de gamme n’a pas été sans constater un certain nombre d’évolutions plus ou moins radicales.

Entre autres, le nombre de salles où la distorsion engendrée par le système était clairement audible m’a vraiment interpelé, et ce à double titre :

Premièrement parce que cela n’avait pas l’air de préoccuper les exposants, signe que le niveau d’exigence par rapport à la mise en œuvre d’un système est plutôt orienté à la baisse.

Et deuxièmement, parce que les visiteurs et la presse spécialisée avaient l’air de ne pas s’en soucier davantage. La presse spécialisée s’est d’ailleurs transformée en l’espace de quelques années en une cohorte d’individus munis d’un appareil photo et d’un bras articulé qui viennent filmer deux minutes une salle sans poser aucune question, ni peut-être vraiment écouter le système lui-même. Je suppose que tout ça part sur les réseaux sociaux et YouTube et c’est bien là l’essentiel….

Au milieu de tout ça, je vous rassure, il reste quand même de l’humain, et certains exposants ont marqué en ce qui me concerne cette édition 2023. Si je devais décerner un titre du meilleur son du salon, je le remettrais à deux salles : Celle occupée par Alsyvox, Pillium, Taiko et LampizatOr, et celle de Grimm Audio.

La première confirme, s’il en était encore besoin, la qualité de ces grands panneaux à rubans espagnols (modèle Raffaello), surtout lorsqu’ils sont alimentés par une amplification aussi puissante et stable que Pillium Audio. Enfin, la source constituée par le serveur Taiko et le haut de gamme LampizatOr (Horizon) figurent dans ce qui se fait de mieux aujourd’hui en termes d’exploitation des supports numériques. Lukasz Fikus, patron de LampizatOr, est par ailleurs un des rares fabricants à tourner sur le salon pour rester à l’affût de ce qui se fait chez les autres, et je trouve que c’est une saine démarche que de ne pas s’isoler dans sa tour d’ivoire.

Le second système que je positionnerais exæquo sur la plus haute marche du podium est celui démontré par Eelco Grimm, principal représentant du fabricant hollandais Grimm Audio. Munich était l’occasion de présenter au public le MU2, conçu sur la base du transport MU1, avec un DAC maison intégré. Cette source numérique était associée à du matériel vintage, deux petits moniteurs épaulés par le subwoofer des enceintes LS1, et des amplificateurs appartenant à Eelco Grimm, utilisés pour la mise au point du MU2.

Ce streamer DAC, en dépit du système minimaliste (de bonne facture mais dans un budget relativement modeste en comparaison de l’autre occupant de la première marche de mon podium), m’a vraiment étonné, tellement le niveau de naturel et de résolution était stupéfiant. Avec un prix prévisionnel de 18.000 €, cette source numérique est une vraie bombe, de quoi venir chatouiller toutes les sources les plus onéreuses du moment.

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Eelco Grimm disposait d’une base déjà excellente avec le MU1, mais le MU2 semble tout simplement exceptionnel. J’ai vraiment hâte de pouvoir en réaliser un banc d’essai, peut-être d’ici la fin de cette année car l’appareil devrait être commercialisé vers le mois d’octobre.

Munich reste par ailleurs la grande messe de la haute-fidélité avec son lot de découvertes et de bonnes surprises.

Parmi les bonnes surprises, je tiens à féliciter certains exposants : L’association Apertura, Wattson Audio, Enleum et Câbles Luna fonctionnait à merveille : un système assurément très homogène, et une enceinte Apertura Forte qui représente une très jolie évolution chez le fabricant français avec son tweeter de type ring radiator (SB Acoustic) et son rendement plus généreux. La nouvelle évolution du Madison de Wattson Audio semble également aller encore un peu plus loin, notamment en matière de dynamique.

L’allemand Audiaz associé à Esoteric et Pass m’a fait également très bonne impression. Au pays d’Accuton, les montages se suivent et ne se ressemblent pas tous. Mais il est difficile d’être encore surpris par ce genre d’enceintes et c’est déjà presque un petit exploit que de susciter l’enthousiasme. L’Opera Grandezza, flagship d’Audiaz sort quand même du lot avec un tweeter à dôme diamant de 3 cm de diamètre et un médium diamant également de 9 cm de diamètre, ce qui en fait le plus gros haut-parleur diamant utilisé à ce jour.

Vienna Acoustics présentait une toute nouvelle enceinte connectée Mozart Infinity, pouvant également fonctionner en passif. Une démonstration plutôt convaincante et assez réjouissante dans la veine des petites Beethoven baby…

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Concernant les découvertes, GAIT de Taïwan présentait sa production de membranes en verre ainsi que deux enceintes embarquant ces diaphragmes montés sur des suspensions caoutchouc. Contrairement à ce qu’avait pu initier Gilles Milot de façon très artisanale avec sa version Glass des Leedh E2, cette production est industrielle et promet sans doute de démocratiser davantage l’utilisation du verre pour la conception de membranes de haut-parleurs.

Un autre nouveau venu à Munich fut le Sud-Coréen Orchestalls. Ce nouveau fabricant nous proposait d’écouter une juxtaposition de moniteurs portés par des potences modulables en acier un peu comme le fait Goldmund. La juxtaposition de plusieurs moniteurs sur un même axe horizontal permettait d’obtenir une sensation de live assez réaliste et pourrait constituer une solution très intéressante dans le cadre d’une installation mixte audio vidéo.

Au chapitre des (petites) déceptions, je citerais les Chinois d’EST. J’avais adoré les précédentes démonstrations dans les petites cabines des halls d’exposition du rez-de-chaussée, malgré l’espace finalement très réduit pour des systèmes aussi encombrants. Cette année EST occupait au deuxième étage un très grand espace, auparavant dédié à la restauration du salon. Force est de constater que les lois de l’acoustique s’appliquent à toutes les enceintes et à tous les systèmes aussi chers soient-ils. L’écoute en champ direct des années précédentes était donc bien meilleure. Reste donc à trouver le juste milieu entre salle trop petite et hall de gare…

Autre déception, et pas des moindres, celle des choix musicaux complètement inaptes à démontrer l’efficacité réelle d’un système haute-fidélité. Entre disque vinyles qui craquent, Dave Brubeck et La Panthère Rose, c’est assez déprimant de constater que si peu de personnes animant ces stands s’intéressent à la musique. Choix personnels, ou dictés par le public ? Difficile de se prononcer mais pour la majorité, il semblerait que la haute-fidélité ne soit pas vraiment l’objectif recherché. Signe des temps, le monde change, et pas forcément toujours en bien…

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Joël Chevassus

2 réflexions au sujet de “Éditorial juillet 2023 ”

  1. Bonjour, effectivement le système Alsyvox était le meilleur. Très probablement mieux avec les amplificateurs Apurna que vous aviez testés en 2018 qu’avec les Pilium, notamment depuis les versions 2023. Le Lampizator est bien mais I’m a fallu shunter l’étage préamplificateur pour atteindre la meilleure écoute de ce système. Un DAC à tubes en 2023 ce n’est plus nécessaire, un ensemble Playback MPT8+MPD8 aurait pu être plus défini et plus transparent.

  2. Bonjour,
    Cette année je renonce aux salons (en France) qui deviennent un objectif de ballade pour beaucoup de gens.
    Le dernier salon à la Porte Maillot était une horreur, même à l’ouverture.
    Et surtout, comme vous le soulignez, la « musique » passée par les exposant est lamentable.
    Même chez des constructeurs sérieux.
    Musiques de films, variétés etc., toutes choses qui ne démontrent rien.
    Son trop élevé et lorsqu’on demande du classique, le démonstrateur prend un air embêté, cherche désespérément, choisit n’importe quoi et arrête au bout d’une minute…
    Ou refuse d’un ton sans réplique (pas prévu !) comme à l’hôtel Nikko (avec chaîne Esoteric, câbles hors de prix etc. !).
    Chez Atoll, écoute minable, pièce de 10 m2 à l’acoustique médiocre, musiquette ; je suis parti malgré les enceintes Dyptique Audio 160.

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